(Re)configurations du travail domestique
Travail, genre et sociétés, n°246, 2021/2 – novembre, La Découverte
Soline Blanchard, Isabel Boni-Le Goff, Pauline Delage et Isabelle Puech (coords.)
Historiquement, le travail domestique – ici défini comme l’ensemble des tâches non rémunérées, accomplies dans le cadre familial et nécessaires à la (re)production de la vie – a occupé une place centrale dans l’analyse des mécanismes de production et de reproduction des rapports sociaux de sexe. Qu’en est-il dans un contexte de mutations du travail salarié et des conjugalités ?
Les recherches menées sur le sujet s’articulent autour de deux grands axes : la possibilité du changement dans la division genrée du travail et les déclinaisons du travail domestique selon les groupes sociaux.
Le premier axe prolonge des débats théoriques sur les conditions de reproduction des rapports sociaux de sexe. En éclairant combien les tâches domestiques s’inscrivent dans un système d’exploitation du travail et du corps des femmes dans l’institution familiale, les féministes matérialistes ont mis au jour les bénéfices que retire le groupe des hommes du travail reproductif gratuit et les résistances opposées à la remise en cause des rapports d’exploitation [Guillaumin, 1991 ; Delphy et Leonard, 2019]. La perspective féministe marxiste a souligné le rôle du système patriarcal dans l’essor du capitalisme et montré que les enjeux économiques du travail reproductif dépassent largement les frontières de l’espace familial [Federici, 2018].
Sous des angles différents, ces deux approches ont insisté sur l’ancrage puissant d’une appropriation du travail gratuit réalisé par les femmes, notamment ménager et parental, invitant à prendre avec beaucoup de circonspection l’annonce d’une nouvelle ère des rapports de genre…
Membres du CRESPPA-CSU, Isabel Boni-Le Goff est Maîtresse de conférences à l’Université Paris 8, Pauline Delage est Chargée de recherche au CNRS